Ce sont les comptes de plus de 100 000 € de dépôts qui sont concernés, comme l’a confirmé une directive européenne transposée en France qui s’applique depuis janvier 2016. Les épargnants ne seront cependant sollicités qu’en troisième recours.
La Commission européenne avait annoncé qu’elle allait poursuivre six pays européens n’ayant pas encore transposé cette directive dans leur droit national. C’est suite à cette annonce que beaucoup ont entendu parlé de cette nouvelle mesure européenne concernant le redressement des banques et la résolution de leurs défaillances. De manière concrète, cette directive autorise désormais les banques en cas de crise grave, à solliciter les actionnaires, les détenteurs d’obligations émises par la banque, et enfin les clients disposant d’un compte de plus de 100 000 €, dans cet ordre précis. A quoi correspond concrètement cette directive ? Que doivent faire les épargnants ?
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ToggleEn quoi consiste la directive dite BRRD ?
La directive relative au redressement des banques et à la résolution de leurs défaillances (BRRD) a été transposée en août 2015 via une ordonnance en France. Cette directive qui est passée presque inaperçu, représente pourtant un grand changement pour les épargnants. Elle instaure une procédure de « bail-in », ou « renflouement interne », en opposition au « bail-out », ou « renflouement externe ». Cette dernière permettra d’éviter que seuls les Etats ne participent au sauvetage des établissements financiers.
Auparavant, les banques avaient la possibilité de se tourner vers les actionnaires puis les créanciers. Désormais, les clients sont également sollicités en troisième recours. La nouvelle directive s’appliquera aux 28 Etats membres de l’Union Européenne et s’articulera également avec le Mécanisme unique européen de résolution des banques.
Une mesure déjà appliquée à Chypre, sans cadre légal
A Chypre, cette mesure avait été prise sans cadre légal, sans loi spécifique. Cela n’a pourtant pas constitué d’obstacles pour ponctionner les comptes bancaires. Pour autant, malgré ce déni de démocratie, cette mesure a été moins scandalisée. Lorsqu’elle a été élargie à la France et aux autres pays européens, la directive BRRD a suscité de nombreux mécontentements et contestations. Pour certains, Chypre aurait servi de ballon d’essai avant la généralisation de la mesure à l’espace européen. En effet, lors de la crise financière de l’île, il a été décidé au plan européen que cette ponction pouvait s’avérer nécessaire. Or, cela était illégal, encore une fois. Chypre a accepté en 2013 des ponctions de 47,5 % sur les dépôts de plus de 100 000 € à la première banque de l’île, Banque of Cyprus. Cette décision avait alors provoqué la colère des chypriotes qui se sont empresser de vider leurs comptes bancaires.
Une telle directive doit-elle inquiéter les clients des banques ?
Cette directive européenne a été mise en place dans le but de permettre aux banques de survivre dans l’intérêt des clients. Les banques profitent depuis plusieurs années d’un système grâce auquel elles reçoivent de l’argent quasi-gratuit en provenance des banques centrales. Elles peuvent alors sur jouer avec cette monnaie sur les marchés avec des effets leviers impressionnants. Or, il semble évident que surviendront à un moment ou un autre, des pertes monumentales. Dans cette situation, les Etats-Unis ne pourront pas assumer les pertes des banques, car déjà endettés. Pour éviter la faillite, il ne le restera plus que les comptes des particuliers.
Les dépôts bancaires jusqu’à 100 000 € sont garantis
Pourquoi 100 000 € ? Cela dépend en réalité du montant de la perte. Les effets leviers des banques sont si importants qu’ils pourraient largement excéder les fonds propres de la banque et de ses actifs. Reste à savoir si certains déposants sont prêts à ouvrir plusieurs comptes dans différents établissements pour rester sous le seuil des 100 000 €.
Les modalités de la garantie des dépôts bancaires ont été précisées par le Parlement et les représentants des Etats. Dans un délai de 10 ans à compter de l’entrée en vigueur de ces nouvelles règles, chaque mécanisme national de garantie devra détenir un montant de 0,8 % des dépôts couverts. Ce délai pourra être allongé si la garantie est activée dans la période initiale de 10 ans. Concernant les épargnants, ils recevront leur argent sous sept jours ouvrables après la faillite de la banque, contre vingt jours auparavant. Des exceptions sont encore possibles d’ici l’année 2024. Si jusqu’à présent, c’étaient les Etats qui renflouaient les banques grâce à l’argent des contribuables, ce renversement vers les banques pourraient poser plusieurs questions notamment celle de la transparence de la gestion des banques pour les clients.
Dans tous les cas, si cette directive est aujourd’hui inéluctable, il est désormais possible d’être dans des systèmes d’épargne moins exposés car toutes les banques ne jouent pas avec des effets leviers colossaux. Certains même, refusant toute idée de ponction et quittent la France.