Pourquoi Avatrade n’a pas obtenu notre label ?

Fin 2014, nous avions dénoncé les pratiques d’AvaTrade. Sur de lui, le courtier a bien voulu réagir à notre article en jouant la transparence. Il nous a fait parvenir une demande de certification par Warning Trading. Au terme de notre enquête, tout ce que nous avons précédemment écrit est confirmé et même aggravé par l’attitude d’AvaTrade.

Fin 2014, nous publions deux articles sur ce poids lourd des CFDs, qui cible en priorité une clientèle de particuliers largement ignorants des marchés financiers. D’abord, un test en aveugle pour découvrir que ce courtier d’origine israélienne viole allègrement la législation européenne en proposant la gestion pour le compte de tiers. Puis, c’est un portrait de cette société interlope, basée aux Îles Vierges britannique, maintes fois accusée par ses clients et diversifiée dans les produits les plus toxiques, comme les options binaires (sous la marque Power Option).

Comme à chaque publication, nous sollicitons une réaction d’Avatrade pour lui proposer un droit de réponse. Début 2015, nous parvenons enfin à joindre le directeur du bureau parisien d’AvaTrade. Florent Le Manach dirige cette succursale depuis près de 5 ans. Commentaire de l’intéressé: “Vous y allez fort”. Cependant, aucune contradiction n’est apportée aux faits que nous avançons. Nous proposons à Avatrade de se soumettre à notre test de certification. A notre grande surprise, la direction d’Avatrade accepte et nous missionne le 19 mars dernier. Florent Le Manach insiste même pour être interviewé face à notre caméra dans son bureau parisien.

Dans cet entretien, enregistré le 11 Mai 2015, Monsieur Le Manach présente AvaTrade comme le plus rigoureux des courtiers. Il présente son employeur comme une société irlandaise régulée, qui ne propose pas de bonus (80 euros maximum, comme la loi le prévoit). A l’entendre, AvaTrade ne propose pas de gestion car la loi l’interdit. Il va même jusqu’à considérer que les options binaires sont assimilable à du casino. Or AvaTrade propose des option binaires sous la marque Power Option. Des affirmations qui vont toutes être contredites par notre test.

Étonnamment, Monsieur Le Manach n’a pas souhaité nous recevoir dans ses bureaux.

Nous avons du faire l’interview dans une salle de réunion. Nous comprendrons après coup qu’AVATRADE loue des bureaux dans un centre d’affaire situé 29 rue de Bassano dans le 8 ème arrondissement.

Comme le prévoit la procédure de certification, notre client mystère s’installe devant son ordinateur le 14 avril 2015. Il ouvre un compte sur le site internet d’AvaTrade. 5 minutes passent avant que sonne son téléphone. Au bout du fil, une certaine Madame Carlier. Nous l’apprendrons plus tard, Carlier n’est pas son vrai nom. Et nous ne savons pas précisément où elle se trouve. Elle parle parfaitement le Français mais ce qui est certain, c’est qu’elle n’est pas en France. Nous pensons qu’elle se trouve plutôt en Israël, comme la plus grosse partie du personnel d’Avatrade.

Première entorse à la transparence que doit garantir un courtier. Pourquoi cacher l’identité réelle d’un employé? Accepteriez-vous d’ouvrir un compte auprès d’un banquier qui ne vous donne pas son vrai nom? Elle veut nous parler des documents à lui renvoyer pour confirmer l’ouverture de compte. Nous nous exécutons le lendemain.

Mais elle dévie rapidement sur… les bonus offerts par Avatrade. C’est terriblement compliqué et obscur. D’après ce que nous comprenons, il faudrait trader 10 000 euros pour gagner 1 euro de bonus. Nous ne comprenons pas très bien le rapport avec la grille des bonus qui nous a été adressée par mail. Il nous semble comprendre, d’après ses explications, que pour espérer gagner 100 euros de bonus, il faudrait investir un million d’euros environ. C’est un très mauvais signal parce qu’un courtier sérieux n’offre jamais de bonus. Il se contente d’être performant et compétitif. Au surplus, c’est illégal.

Cela s’aggrave encore lorsque nous demandons à Deborah Carlier s’il serait possible de confier la gestion de notre argent à un trader professionnel.
Notre télé-conseillère saute sur cette occasion. C’est évidement possible, AvaTrade peut effectivement nous recommander un trader. Pour bénéficier de ses conseils, nous devons impérativement déposer plus de 5 000 euros. Madame Carlier justifie cette contrainte en invoquant la réglementation. Elle nous envoie donc un contrat de gestion de compte et nous met en contact avec Florent Le Manach, présenté comme le responsable de cette activité. Le code des marchés financiers interdit à AvaTrade d’exercer en même temps des activités de gestion pour compte de tiers ou les services de réception-transmission d’ordres (REF AMF). AvaTrade tente de contourner cette interdiction en se limitant à la “recommandation” de traders. Mais ces traders sont en réalité rémunérés par Avatrade en tant qu’apporteur d’affaire.

D’ailleurs, étrangement, dans un premier temps, ce n’est pas Monsieur Le Manach qui prend contact avec nous mais Yoann Servant, qui se présente comme “le trader qui doit s’occuper de la gestion” de notre compte. Il met en avant son expérience de 7 ans dans le trading. Il habiterait près d’Aix-en-Provence. Ses performances? 13% en 2013 et 26% en 2014! On nous a attribué un champion du trading. Et c’est bien un apporteur d’affaire commissionné par Avatrade puisqu’il nous demande d’ouvrir un compte en cliquant impérativement sur le lien qu’il nous envoie par mail.

Dispose-t-il de l’autorisation nécessaire pour exercer cette activité? “Non” répond-il avec une franchise déconcertante. Il ne dispose pas d’autorisation parce qu’“en ce qui concerne les CFDs, rien n’est prévu comme pour les produits classiques, comme les actions”. Pourtant, la loi est claire et dispose qu’en matière de produit financier, le gestionnaire de compte doit impérativement être réglementé, même s’il propose des CFDs. La profession de conseil en finance impose de recourir au mandat d’une société de gestion régulée ou de bénéficier d’une autorisation de l’autorité des marchés financiers (AMF).

Est-il indépendant d’AvaTrade? Yoann Servant reconnaît être en contrat avec AvaTrade et être rémunéré par ce courtier. Pour simplifier, il prend environ 50% de la commission perçue par AvaTrade. Pour éluder la question, il nous rappelle que c’est avec lui que nous devons signer un mandat de gestion et non avec AvaTrade. Pas sûr que cette séparation formelle soit conforme à l’obligation de séparer strictement les activités de courtage et les activités de gestion pour le compte d’un tiers. Par ailleurs, ce trader est incapable de nous fournir la preuve de son inscription au registre du commerce. Comment déclare-t-il les revenu tirés de ses Trades? Face à un tel dossier, il est très probable qu’un juge requalifierait sans hésiter sa relation avec AvaTrade en une relation de subordination.

Quel établissement bancaire recevra les fonds? Difficile a déterminer avec précision. Yoann Servant penche pour l’Irlande mais admet qu’Avatrade dispose de plusieurs dépositaires. Nous finissons par apprendre que c’est au Danemark que se trouvera la banque réceptrice dans notre cas. Pour rappel, un courtier régulé a interdiction de mélanger ses fonds propres avec les fonds de ses clients sur un seul et même compte bancaire.

Monsieur Servant avance des performances de gestion impressionnantes. Sa communication est bien rodée. Il propose deux profils de gestion, l’un “dynamique”, l’autre “sécuritaire”, avec des performances variant de 1 à 4. Mais même avec l’option sécuritaire, il garantit des bénéfices de 30% par an! Impossible de bien comprendre la différence concrète entre les deux profils. Il est question de signaux, qui seraient de meilleur qualité dans la gestion dynamique. Mais le nombre de Trades n’entrerait pas en ligne de compte. Malheureusement, nous n’aurons pas l’opportunité de vérifier ses prétentions car nous n’irons pas plus loin. Notre dernier contact, un mail du 19 mai, tenant en une phrase: “quelles sont les nouvelles?”.

Yoann Servant est en fait une des plus vieilles connaissances de notre site. C’est indirectement grâce à lui que Warning Trading a été créé. Il avait dilapidé plus de 300 000 euros qui lui avaient été confié. A force de nous battre pour récupérer cet argent, nous avions acquis une très bonne connaissance des rouages de ces arnaques. Et c’est ainsi que nous avions eu l’idée de créer Warning Trading. Nous avons retrouvé Monsieur Servant dans le dossier d’une autre victime. Déjà avec le même scénario que pour notre test. Peut-être que cet article incitera d’autres victimes à se manifester?

Nous ne pouvons pas attribuer le label Warning Trading à AvaTrade. Certes, ce broker est régulé en Irlande et nous n’avons répertorié aucune difficulté dans le retrait de fonds par des particuliers. Mais ce sont les seules exigences satisfaites par ce courtier. Cette plateforme ne satisfait pas nos exigences de transparence. Les propriétaires d’AvaTrade sont en réalité en Israël et c’est en Israël qu’est localisé la plus grosse partie de son infrastructure. Cette information est soigneusement dissimulée par le Directeur général d’AvaTrade France, Florent Le Manach, qui explique sans détours que “c’est la politique de la direction de ne pas communiquer là-dessus” après l’interview qu’il nous a accordé. Nous savons également par nos précédentes investigations que la sécurité et les conditions de trading sont mauvaises. Enfin le support téléphonique est certes performant, même s’il confine parfois au harcèlement, mais il devient déplorable dès que l’on a perdu son argent.

Nicolas Gaiardo

Nicolas Gaiardo

Nicolas est un journaliste engagé dans la lutte contre les escroqueries financières et passionné du monde de la finance. "Débusqueur" des dernières arnaques astucieuses dans des produits financiers dits atypiques, il se fait un point d'honneur à vous en faire profiter.

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