Forex : vers une déviance structurelle du système ?

Le Forex représente le marché le plus liquide au monde mais aussi le plus volumineux après celui de la dette. L’appât du gain et la peur de perdre font partie intégrante du trading en ligne qui devient un véritable refuge pour les escrocs. Pour autant, peut-on dire que nous allons vers un système de fraude de grande ampleur ?

Les vendeurs de Forex se retrouvent dans une position délicate notamment du point de vue de l’éthique puisqu’ils commercialisent des produits à risque pour les particuliers. Gains fictifs, séduction, harcèlement, réglementation piétinée… Nombreuses sont les dérives de l’industrie du Forex. Comment les vendeurs gèrent-ils une telle situation ?

Une dimension technique et économique amplifiée

Le Forex ou Foreign Exchange est une bourse mondiale qui se matérialise par des opérations de gré à gré. Contrairement à ce que les vendeurs souhaitent faire croire, il ne s’agit généralement pas d’un marché sur lequel on peut s’enrichir. Internet a peu à peu ouvert cette industrie aux simples particuliers. Publicités, promesses de gains rapides, possibilité de gagner sa vie grâce au trading, les tentations sont nombreuses. Ce qui pousse les vendeurs à de telles pratiques, ce sont évidemment des motifs de nature économique. Les conditions financières leurs apportent un certain confort qui les empêche de sortir de cette déviance, et compense largement le « coût moral » de leurs agissements.

Pour assumer leur activité dont ils sont conscients de la dimension problématique, les vendeurs retiennent la dimension technique et économique de leur métier. Ils se persuadent que leur travail apporte une valeur positive aux internautes, et se déclarent en quelque sorte responsables tout en excluant une quelconque faute morale. Ils pratiquent ainsi des opérations de marketing mais avec une dimension un peu différente, à l’abri de condamnation morale provenant de l’extérieur. Leur quotidien s’apparente à une sorte de cocon qui les préserve des conséquences réelles de leurs actes. Cependant, le cadre législatif se renforce progressivement. En effet, l’AMF et la DGCCRF entendent désormais traquer la publicité en ligne pour les particuliers concernant les options binaires, les CFD et le Forex.

Des stratégies de commercialisation contraires à l’intérêt des investisseurs

Le trading en ligne a beaucoup évolué durant ces dernières années. Conscients que ce marché attire un public large, escrocs et sociétés non régulées n’ont pas hésité à s’immiscer. Alors que de tels services devraient avant tout reposer sur la compétence du client, la proposition de produits financiers adaptés à ses besoins et à sa situation, comme le précise l’article L. 533-13 du code monétaire et financier, cela est loin d’être le cas. Effectivement, de graves manquements ont pu être constatés par l’Autorité des marchés financiers (AMF) faisant ressortir un comportement déviant des vendeurs. Ces derniers s’appuient aujourd’hui davantage sur l’illusion et la mise en confiance pour appâter leurs clients. Il est par exemple fréquent, qu’un trader fasse ouvrir un compte virtuel à un particulier, uniquement pour le convaincre qu’il est fait pour spéculer. Bizarrement, les comptes virtuels sont toujours gagnants. Confiant, le particulier décide alors d’investir avec son propre argent. Conseils, coaching, tout est mis en œuvre pour encourager le particulier à miser toujours plus, malgré les pertes. Ces pratiques se transforment parfois en harcèlement. Les conséquences financières peuvent être désastreuses. Comment les vendeurs vivent-ils une telle situation ?

En commercialisant des produits financiers à risque, les vendeurs se positionnent au cœur d’un conflit opposant d’une part les normes sociales qui encadrent la société, et d’autre part celles de l’entreprise dont le but est de promouvoir des placements qui ne sont pas à la portée de tous. Plusieurs recherches menées par des sociologues montrent que ces individus, escrocs, qui commettent des déviances, limitent leur culpabilité en se persuadant que leurs méthodes ne sont pas problématiques. Cinq techniques de « neutralisation » sont généralement identifiées : le déni de responsabilité, des dommages, des victimes, la condamnation des accusateurs et l’invocation d’autorités supérieures.

Si certains vendeurs de Forex survivent de nombreuses années dans ce secteur en se déresponsabilisant ou en acceptant de rester dans cette « prison dorée », d’autres se font prendre à leur propre jeu. Cependant, ces derniers restent peu nombreux puisque le nombre de vendeurs ne fait qu’augmenter sur le marché du Forex qui nécessite davantage de contrôle. On pourrait donc parler d’une déviance structurelle du système puisque celle-ci tend à s’inscrire dans la durée faisant chaque jour toujours plus de victimes.

Nicolas Gaiardo

Nicolas Gaiardo

Nicolas est un journaliste engagé dans la lutte contre les escroqueries financières et passionné du monde de la finance. "Débusqueur" des dernières arnaques astucieuses dans des produits financiers dits atypiques, il se fait un point d'honneur à vous en faire profiter.

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