35 fois le PIB de la France. Ce chiffre représente la somme investie par quatre grandes banques françaises dans des contrats de produits dérivés.
Selon les calculs d’Alternatives Economiques, BNP Paribas, la Société Générale, le Crédit Agricole et la BPCE ont investi près de 75 000 milliards d’euros dans les produits dérivés. A l’origine de multiples dérapages financiers depuis le début des années 1970, ces produits font pourtant l’objet d’une spéculation importante qui tend, heureusement, à diminuer depuis le pic de 2011.
Les banques ne semblent pas avoir retenu la leçon de la crise de 2008
La leçon n’a pas été retenue par les banques. Lorsqu’une crise se termine, les acteurs qui en sont à l’origine sont censés en tirer les conséquences afin qu’elle ne se reproduise plus. Cependant, les produits dérivés, ultimes outils spéculatifs des banques, dépassent déjà leur niveau d’avant-crise. Pour rappel, ces derniers peuvent prendre plusieurs formes : CDS, dérivés de taux, swaps… Il s’agit généralement de contrats signés par une banque, une entreprise, un Etat avec une institution financière. Le principe de ces instruments financiers est de se prémunir contre le futur et de créer un décalage dans le temps afin de pouvoir vendre à découvert. Cela permet de bénéficier d’un effet levier, c’est-à-dire de parier que le prix du produit vendu coûtera moins cher à l’achat au moment où sera réalisée la vente.
Les produits dérivés représentent-ils un danger pour l’économie réelle ? En 2002, Warren Buffett affirmait que ces produits représentaient « des armes financières de destruction massive ». Après avoir été au cœur de la crise de 2008, ils continuent de croître tout en restant déconnectés de l’économie réelle.
Seuls 4 % des dérivés destinés à couvrir les risques pris par les banques
Les quatre plus grands établissements bancaires français, BNP Paribas, Société Générale, Crédit Agricole et BPCE, ont investi une somme colossale dans les contrats de produits dérivés : 75 000 milliards d’euros à la fin 2015. Après leur apparition, les produits dérivés se sont développés sans aucune réglementation ni aucun contrôle jusqu’à atteindre un montant total atteignant 35 fois le PIB de la France pour ces banques. Si le chiffre est alarmant, il ne correspond heureusement pas aux risques pris par les banques avec ces instruments. En effet, certains produits dérivés servent réellement à protéger les banques contre des risques financiers. Cependant, ces derniers ne représentent que 4 % du total. Les autres sont surtout utilisés pour spéculer tant pour le compte de la banque que de ses clients.
Les risques encourus par les banques diffèrent en fonction de la nature du produit dérivé. Pour les contrats dérivés de taux qui sont majoritaires, le risque est basé sur la variation du cours du sous-jacent et non sur son montant total. Pour un CDS en revanche, qui est comparable à une assurance-crédit, le risque peut aller jusqu’à 100 % du notionnel. Le montant notionnel ne renvoie pas aux risques associés aux contrats de dérivés mais au volume de l’activité d’une banque. S’il est presque impossible de se faire une idée du risque encouru par les banques, il est certain qu’une faible perte suffirait à rogner leurs fonds propres.
Quelles solutions pour limiter ces risques ?
Face à l’importance de l’investissement des établissements bancaires dans les contrats dérivés, les régulateurs ont créé des chambres de compensation. Ces dernières sont destinées à éliminer les risques de contrepartie sur les marchés dérivés en mutualisant le risque supporté par les banques. Elles sont également chargées d’assurer la surveillance des positions et exigent davantage de sécurité lors de la conclusion d’un contrat. Cependant, une large part du marché OTC de produits dérivés n’est pas traitée par les chambres de compensation. D’autres solutions ont été proposées comme l’instauration d’une taxe sur les transactions de produits dérivés, mais des désaccords subsistent.
Les activités sur les produits dérivés sont malgré tout en baisse de 20 % par rapport au pic de 2011. Cela s’explique par les règles mises en place progressivement par les régulateurs financiers, rendant ces instruments financiers moins rentables. Malgré cette législation et la baisse de l’activité, le montant des produits dérivés vendus par les banques reste considérable, représentant plusieurs milliers de milliards d’euros. De plus, cela n’exclut pas le risque d’une crise bancaire internationale.