Phénomène déjà documenté, les arnaques à la location prennent une ampleur inédite avec cette affaire record impliquant la plateforme Airbnb.
Shray Goel et Shaunik Raheja, un duo d’escrocs bien organisé
Shray Goel, 35 ans, résidait à Miami. Shaunik Raheja, 34 ans, à Denver. Tous deux sont accusés d’avoir monté une escroquerie de grande ampleur sur les plateformes de location de courte durée Airbnb et Vrbo. Airbnb a publié un communiqué sur cette affaire.
Leurs méthodes étaient simples. Leur efficacité redoutable. Entre 2018 et 2019, le duo aurait généré plus de 8,5 millions de dollars de revenus frauduleux. Plus de 9 000 réservations auraient été touchées. Des milliers de voyageurs floués, souvent à la dernière minute, laissés sans solution.
Des annonces clonées, des hôtes fictifs, des propriétaires floués
Goel et Raheja publiaient plusieurs annonces pour un même logement. Ils utilisaient de faux noms, fausses adresses, faux comptes hôtes. Une seule maison, parfois proposée sous trois à cinq identités différentes.
Une fois les réservations validées, ils triaient. Les voyageurs ayant payé le moins cher étaient les premiers à être annulés. Prétexte : fuite d’eau, canalisation cassée, dégâts soudains. Des excuses standardisées. Peu vérifiables. La victime, souvent en déplacement, acceptait l’annulation ou était réorientée vers un logement bas de gamme.
Un système qui a rapporté 8,5 millions de dollars aux escrocs
Le plan fonctionnait grâce à la confusion et la vitesse. Sur les plateformes, les annulations sont fréquentes. En se faisant passer pour des hôtes soucieux, les escrocs minimisaient les soupçons.
Dans certains cas, les voyageurs annulaient eux-mêmes — à leur détriment. Car sur Airbnb ou Vrbo, une annulation par l’invité entraîne la perte des frais. Les escrocs, eux, conservaient l’argent.
Au total, plus de 8 400 réservations confirmées, pour un total de 8,5 millions de dollars encaissés. Une fraude d’une ampleur inédite dans le secteur de la location entre particuliers.
Cerise sur le gateau: ils pratiquaient la discrimination raciale
L’acte d’accusation va plus loin. Goel et Raheja auraient aussi sélectionné leurs victimes selon des critères raciaux. Les clients noirs, ou perçus comme tels, étaient systématiquement évincés. Les messages entre les deux hommes, révélés par la justice, révèlent des échanges à connotation raciste.
Un élément aggravant, selon les procureurs. Une preuve supplémentaire du mépris des victimes et de leur volonté de tirer profit des failles du système, au détriment des plus vulnérables.
Les réponses technologiques aux fraudes sont inefficaces
En 2015, Vrbo bannit déjà Goel pour activités suspectes. Mais il revient. Sous un autre nom. En volant l’identité de tiers. Grâce à de faux documents, de nouvelles cartes bancaires, et parfois des identités d’employés.
Les avis négatifs ? Supprimés. Les comptes trop exposés ? Effacés. Les annonces mal notées ? Repostées sous d’autres identités. Une stratégie de rotation permanente, bien huilée.
Les plateformes, malgré leurs systèmes de sécurité, n’ont rien vu. Ou pas à temps. Les clients, eux, n’avaient aucune chance.
Arrestatation et inculpation par un grand jury fédéral
En juin 2024, les deux hommes sont arrêtés. Un grand jury fédéral les inculpe. Complot en vue de commettre une fraude électronique, 13 chefs de fraude électronique, et pour Goel, vol d’identité aggravé.
Chaque chef est passible de 20 ans de prison. La procédure est en cours. Mais les preuves semblent accablantes. Témoignages de victimes. Courriels internes. Captures d’écran. Fichiers comptables.
Goel a été interpellé à Miami. Raheja à Denver. Ils ont plaidé non coupables.
Airbnb et Vrbo mis en accusation pour manque de vigilance
Airbnb a réagi. La plateforme affirme avoir coopéré avec les enquêteurs. Elle promet des mesures renforcées de vérification des hôtes, des contrôles plus stricts.
Vrbo, de son côté, reste silencieuse. Mais le scandale l’éclabousse. De nombreuses victimes affirment avoir été ignorées par le service client.
Les autorités appellent toute autre victime à se manifester. Plusieurs class actions sont en préparation.
Les failles du modèle de location en P2P
Cette affaire révèle les failles du modèle locatif P2P. Des plateformes mondialisées, des vérifications automatisées, peu de recours efficaces pour les victimes.
Elle illustre aussi les dangers d’une confiance aveugle dans les systèmes de notation. Et l’ingéniosité des fraudeurs à exploiter chaque faille.
Des complices éventuels et des sociétés écrans
Goel et Raheja sont en détention provisoire. L’enquête se poursuit. Les autorités soupçonnent l’existence d’autres complices. D’autres comptes, d’autres sociétés écrans.
L’affaire rappelle une vérité simple : dans le monde des plateformes, l’opacité est reine. Et les arnaques ne reculent devant rien.
Warning-Trading.com continue d’enquêter sur les escroqueries dans le secteur locatif. Si vous êtes victime, contactez notre rédaction.
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