Un groupe d’organisations anglaises hétéroclite demande au gouvernement d’utiliser le projet de loi sur la sécurité en ligne pour mieux protéger les citoyens anglais contre les arnaques en ligne.
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Toggle17 organisations enjoignent le gouvernement de s’engager contre les arnaques en ligne
Après l’échec de la création d’un fonds d’investissement des victimes anglaises d’arnaques, une coalition représentant des organisations anglaises de consommateurs, la société civile britannique et des entreprises demande instamment au gouvernement anglais d’inclure des protections contre les cyber-arnaques en ligne dans le projet de loi sur la sécurité en ligne (Online Safety Bill). Cette coalition prend au pied de la lettre l’ambition répétée du gouvernement de faire du Royaume-Uni « l’endroit le plus sûr du monde ».
Dans une lettre commune présentée le 7 mai 2020 au Ministre de l’Intérieur, Priti Patel, et au ministre du numérique, Oliver Dowden, le groupe demande au gouvernement d’inclure les escroqueries en ligne dans le projet de loi afin de mieux protéger les consommateurs contre « les dommages financiers et émotionnels dévastateurs causés par ces crimes ».
L’étendue et l’hétérogénéité de ce groupe surprendront un Français, peu habitué à un tel consensus politique. On y trouve des membres de toutes sortes, classés autant à gauche qu’à droite:
- L’association de personnes âgées anglaises Age UK
- L’Association des assureurs anglais
- L’Association pour les marchés financiers en Europe (AFME)
- Le think tank Carnegie UK Trust
- La City de Londres
- La police de la City de Londres
- La police londonienne
- Le syndicat de la finance Innovate Finance
- Le lobby de la finance The Investment Association
- L’ONG Money and Mental Health Policy Institute
- Le site de presse spécialisé dans la consommation MoneySavingExpert
- L’association Personal Investment Management & Financial Advice Association (Pimfa)
- Le think tank de gauche B&CE
- Le lobby de la City de Londres TheCityUK
- Le lobby bancaire UK Finance
- L’association d’aide aux victimes Victim Support
- Le média spécialisé dans les questions de consommation Which ?
Le rôle central des plateformes en ligne
« Les plateformes en ligne jouent un rôle central en permettant aux criminels d’atteindre et d’escroquer les internautes par l’hébergement, la promotion et le ciblage de contenus faux et frauduleux sur leurs sites, y compris des publicités dont ils tirent des profits importants. Pourtant, les plateformes n’ont que très peu de responsabilités légales en matière de protection de leurs utilisateurs, alors qu’elles sont souvent les mieux placées pour lutter contre les contenus préjudiciables.
« Bien que nous reconnaissions que des initiatives sont en cours de réalisation par le gouvernement pour lutter contre certains aspects de la fraude en ligne, il existe un risque croissant que les plans actuels pour les futurs cadres réglementaires n’adoptent pas une approche globale des menaces auxquelles sont confrontés les consommateurs et ne reflètent pas l’étendue ou l’urgence du problème. »
Extrait de la lettre ouverte au gouvernement d’une coalition de la société civile militant pour une lutte accrue contre les arnaques en ligne.
Rendre les plateformes légalement responsables
Le groupe a déclaré qu’un large consensus émerge actuellement au sein de l’industrie, des régulateurs et des groupes de consommateurs sur le fait que les plateformes en ligne doivent jouer un rôle plus important en protégeant mieux leurs utilisateurs contre ces arnaques en ligne, et demande que ces plateformes soient légalement responsables de cette protection. Ils estiment que le projet de loi sur la sécurité en ligne, qui pourrait être annoncé dans le discours de la Reine le 11 mai, sera l’occasion idéale de promulguer une telle législation.
« Les plus grandes plateformes en ligne disposent d’une technologie parmi les plus sophistiquées au monde, mais elles ne l’utilisent pas pour protéger les victimes d’escroqueries qui subissent des dommages financiers et émotionnels dévastateurs en raison du flot de contenus faux et frauduleux mis en ligne par des criminels »
Anabel Hoult pour Which ?
« Le temps de l’autorégulation est terminé »
« Le temps de l’autorégulation est terminé, car il est clair qu’elle n’a pas fonctionné. Les arguments en faveur de l’inclusion des arnaques en ligne dans le projet de loi sur la sécurité en ligne sont écrasants et le gouvernement doit saisir l’occasion d’agir maintenant. Les plateformes en ligne doivent avoir la responsabilité légale de prévenir, d’identifier et de supprimer les contenus faux et frauduleux sur leurs sites afin que leurs utilisateurs soient mieux protégés. »
Martin Lewis, fondateur de MoneySavingExpert.com et du Money and Mental Health Policy Institute, ajoute qu’« il est incroyable que le projet de loi sur la sécurité en ligne du gouvernement puisse ignorer l’épidémie d’escroqueries à laquelle le Royaume-Uni est confronté – mais c’était prévisible. Les escroqueries ne consistent pas seulement en un vol de l’argent des gens, elles peuvent aussi leur enlever leur estime de soi, et les personnes souffrant de problèmes de santé mentale sont trois fois plus susceptibles d’être touchées.
« Les services de police chargés de lutter contre les escroqueries manquent cruellement de fonds, ce qui permet aux criminels de s’en tirer en toute impunité. Le gouvernement a la possibilité de les priver au moins de l' »oxygène de la publicité » en rendant les grandes entreprises technologiques responsables des annonces des escrocs qu’elles sont payées pour publier. »
Le cout et les effets dévastateurs de la cybercriminalité
La coalition a noté que l’augmentation de l’utilisation des outils en ligne tout au long de la pandémie de Covid-19 a rendu les gens plus vulnérables que jamais aux escroqueries en ligne – dont les taux ont dûment augmenté l’année dernière, avec plus d’un milliard de livres perdues au Royaume-Uni l’année dernière, et 85% de toutes les fraudes ayant maintenant une composante cybercriminelle. L’ampleur du phénomène correspond à ce que l’on observe en France. L’absence de signalement, due dans de nombreux cas à des facteurs tels que la gêne de la victime ou son manque de confiance dans la possibilité d’obtenir justice, signifie que les coûts réels sont beaucoup plus élevés.
Être victime d’une cyberfraude peut également avoir des effets dévastateurs sur la santé mentale. Maria Jackson, une enseignante de 63 ans victime d’arnaque s’est faite escroquer par une fausse nouvelle contenant de fausses citations de l’explorateur Bear Grylls, censées donner des conseils d’investissement en crypto-monnaies.
Après avoir entré ses coordonnées sur le site Web, Maria Jackson a été contactée par téléphone par un prétendu conseiller financier qui, au fil du temps, l’a persuadée de transférer près de 120 000 livres aux escrocs. Sa banque, First Direct, n’a remboursé que la moitié de cette somme – un porte-parole a déclaré que la banque pensait que Mme Jackson aurait dû être plus prudente, mais il a également reconnu que les avertissements de la banque en matière de fraude auraient pu être plus clairs.
En parlant de l’impact de ce traumatisme, Maria Jackson a déclaré : « Je me suis sentie complètement malade. Je vais globalement mieux maintenant, mais j’ai souvent des flashbacks de certains événements et cela me perturbe beaucoup. Je les ai généralement la nuit quand je suis au lit et quand cela arrive, cela donne le ton d’une mauvaise nuit de sommeil. »