Depuis le 9 juillet, la société RR crypto, une association spécialisée dans l’investissement dans les cryptomonnaies basée à Dijon, est en liquidation judiciaire. Prés de 40 millions d’euros ont disparu. Retour sur une affaire qui n’a pas fini de faire parler d’elle.
« J’ai le regret de vous informer qu’à ce jour, les fonds ne sont plus présents sur le portefeuille, sans accès à l’historique de ce dernier « , le 20 juin 2021, le président de RR Crypto, Vincent Ropiot avertissait ses clients, par email, de la perte de 40 à 60 millions d’euros en cryptomonnaies.
Cependant, selon les investigations du Journal du Coin, le montant évaporé serait de l’ordre de 10 millions d’euros.
L’avocat d’un collectif de victimes qui s’est exprimé au micro de France Bleu Bourgogne précise » Parmi ces victimes, il y a des gens qui ont placé 500 euros, et puis il y en a qui ont placé jusqu’à 350 000 euros « .
Après avoir placé l’association (loi 1901) basée à Longvic en redressement judiciaire le 2 juillet, le tribunal judiciaire de Dijon a placé la société en liquidation immédiate le 9 juillet.
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ToggleUne disparition suspecte de l’argent
Selon le responsable de l’association spécialisée dans le trading de cryptomonnaies, l’argent aurait disparu dès le mois de mars 2021. Néanmoins, jusqu’au 20 juin, RRCrypto menait ses activités comme si de rien n’était. Ni la vingtaine de collaborateurs (traders, commerciaux, conseillers, personnel administratif), ni les 2000 à 3000 investisseurs n’ont eu d’informations sur le désastre qui se tramait.
Compte tenu de l’ampleur de la somme perdue et du nombre de victimes impliquées, le parquet de Paris s’est saisi de l’affaire.
Dès le 22 juin, une enquête a été ouverte pour « vol en bande organisée, atteintes à un système de traitement automatisé de données et blanchiment en bande organisée ».
Dans la foulée, des centaines de plaintes ont été déposées contre X pour « faux, usage de faux, escroquerie, abus de confiance, exercice illégal d’une activité de prestataire sur actifs numériques, démarchage financier et direction d’un organisme de placement collectif sans agrément » .
Une adresse mail a également été créée par le ministère de l’Intérieur pour aider les victimes et regrouper les plaintes : victimes-rr-crypto@interieur.gouv.fr.
RR Crypto : l’association de Bourgogne au succès fulgurant
Su son site web, RR Crypto se décrit comme étant « une association qui propose pédagogie et accompagnement personnalisé pour vos projets concernant les crypto-actifs auprès de particuliers ».
Fondée en 2019 par le dijonnais Vincent Ropiot, un autodidacte dans le trading, l’association a rapidement séduit de nombreux investisseurs de tout profil. Le recrutement de nouveaux clients s’est fait localement, en Bourgogne, par le bouche à oreille. Puis grâce à la diffusion de commentaires sur des forums de discussions.
Le principe du service est simple : RR Crypto fait fructifier vos cryptomonnaies contre une commission de 17% sur les plus-values réalisées. Des témoignages avancent que les rendements atteignaient les 10% à 40% par mois. Le nombre d’investisseurs varie : certaines sources parlent de 2000 individus tandis que d’autres avancent le chiffre de 5000.
En février 2021, Vincent Ropiot précisait dans une interview accordée à Dijon L’Hebdo : » Des procédures existent pour encadrer les activités gravitant autour de la cryptomonnaie, notamment la loi Pacte dont a découlé le statut de PSAN (prestataire de service sur actif numérique). Nous sommes actuellement en procédure pour devenir PSAN auprès de l’Autorité des marchés financiers (AMF) mais nous allons chercher un peu plus loin car nous voulons obtenir l’agrément. Comme c’est un univers nouveau, nous avons dû aussi nous adapter aux demandes de l’AMF qui, elle-même, doit s’adapter à cet univers « .
Apparemment, aucune demande d’enregistrement auprès de l’AMF n’a été faite.
Malgré la pandémie, RR Crypto semblait garder le cap. Dans sa dernière analyse Eco-Crypto d’aout 2020, la société dijonnaise précisait : » Nous envisageons de très beaux jours pour les crypto-monnaies ! Le choc subi au mois de mars dernier a été récupéré avec force et conviction par les acteurs du marché, ce qui conforte sur la puissance des projets crypto et annonce donc de belles perspectives pour l’avenir ! «
En juin 2021, quelques jours avant avoir informé ses collaborateurs et clients de la disparition des fonds, Vincent Ropiot a déposé une plainte auprès de la gendarmerie pour trahison et vol. Il affirme s’être fait « cyber-harcelé » et « menacé ».
Une enquête en cours, un procès pas avant 2023
Une enquête est en cours, coordonnée par le Parquet de Paris. Les investigations sont réalisées par l’Office central de lutte contre la criminalité liée aux technologies de l’information et de la communication (OCLTIC), l’Office central pour la répression de la grande délinquance financière (OCRGDF) et la police judiciaire de Dijon.
Erreur de gestion de portefeuille ? Système de Ponzi dans lequel l’argent des derniers clients servait à rembourser les clients voulant récupérer leur mise ? Chantages et menaces menés sur Vincent Ropiot ? Piratage informatique ? Fraude de Vincent Ropiot ?
Quelque soit la ou les réponse(s), les enquêteurs doivent retracer les comptes de gestion de cryptomonnaies de RR Crypto (mouvements, plateformes de change, adresses de réceptions, etc.), déterminer les ramifications de RR Crypto à l’étranger et enfin, définir le niveau de responsabilité de Vincent Ropiot.
Binance, interviewé par BFMTV, précise que « RR Crypto ne détient aucun compte d’entreprise avec Binance. Binance n’a pas de processus pour ‘réinitialiser’ les fonds enregistrés ». Les fonds étaient-ils déposés sous un autre nom que RR Crypto ? Vincent Ropiot a t-il impliqué, à tort, Binance? Autant d’éléments qui doivent être élucidés et qui laissent à penser que l’entrepreneur dijonnais à des choses à cacher.
Pour l’instant, dans les colonnes du Figaro, Fabien Kovac déplore « Chaque jour, je reçois des appels de nouveaux investisseurs, qui viennent tous de Côte-d’Or».
De son côté, l’avocat de Vincent Ropiot se veut rassurant et précise que l’enfant du pays n’est pas en fuite.